Le pasteur Schlag est un homme honnête, de bonnes intentions qui a été arrêté par le gestapo à cause de son appartenance au mouvement pacifiste. Schellenberg veut l’utiliser comme agent, c’est pour ça qu’il confie son dossier à Stierlitz. Cependant nous ne connaissons pas le processus par lequel Stierlitz a obtenu ou plutôt reçu le dossier du pasteur, mais nous nous doutons de ce qu’il ne s’est pas battu pour avoir cette affaire, contrairement à celle de Runge, le physicien.
Nous voyons seulement au début du premier épisode comment Stierlitz interroge un astronome à la demande de Holtoff, mais cette scène fait une confusion parce que l’astronome n’apparaîtra plus dans l’histoire, il n’a rien à voir avec les événements, il aurait fallu plutôt montrer la façon dont Stierlitz a reçu le dossier de Schlag.
1. Episode 1, le 12 février
Stierlitz s’informe du pasteur, il parle avec le responsable de la section de la prison où le pasteur est détenu. Le spectateur va apprendre avec Stierlitz que le pasteur est en prison depuis 6 mois et demi, il est en grève de faim, ce n’est pas la première fois, la dernière a duré une semaine. Dans la conversation on ne mentionne pas son nom, seulement son numéro : 524.

Pendant que Stierlitz et le responsable parlent on voit le pasteur dans sa cellule, un homme d’un certain âge qui porte le numéro 524 sur son vêtement de prisonnier. Il est harcelé par les autres détenus.
Stierlitz apprend du responsable que le pasteur Schlag a été placé avec des criminels à l’ordre de son enquêteur. Il amène le pasteur dans le restaurant « Zum groben Gottlieb » et ordonne qu’il soit placé à l’isolement carcéral après leur retour.
2. Episode 1, le 12 février
Lors de leur conversation il se révèle que le pasteur n’est pas un homme facilement influençable, il a ses principes et il n’a pas peur de les dire même à un officier de renseignement de l’état allemand. L’état qui le torture depuis six mois.

Le pasteur a d’abord confiance, mais quand Stierlitz fait mention aux voyages du pasteur à Paris, Prague, Berne, il perd sa confiance puisque c’est à cause de son pacifisme qu’il a été arrêté. Il n’a pas peur de rappeler Stierlitz : « On me l’a déjà demandé aux interrogatoires. Quand on m’a battu, privé de sommeil et de nourriture. »
Mais Stierlitz lui reproche de ne pas être patriote de l’Etat allemand. Le pasteur n’a pas peur de répondre : « Et le fait que l’on me torture depuis 6 mois, c’est une conséquence de votre Etat ? » Stierlitz argumente comme un vrai nazi qui est dévoué au régime (rappelons qu’à ce moment-là le spectateur n’imagine même pas que Stierlitz est en réalité russe et il s’appelle Issaïev), donc il dit : « En prison, on rééduque ceux qui se trompent. Les ennemis doivent être éliminés. » Mais le pasteur reste sur un terrain philosophique « C’est vous qui décidez qui est coupable ou non ?… Vous savez tout de tous ? Qui se trompe ? En quoi ? Vous savez vraiment tout ? » Stierlitz reste ferme devant lui : « Nous savons ce que veut le peuple. » La réponse du pasteur est claire : « Mais le peuple, ce sont des personnes. Au nom du peuple, vous éliminez des personnes. »
Et c’est à cet instant que Stierlitz peut lui retourner les accusations : « Et dites-moi combien de fois dans l’histoire du christianisme ont été détruits ceux qui croyaient autre pour que le reste vive mieux. » Le pasteur doit l’approuver : « On détruisait les hérétiques. » Stierlitz retourne définitivement la conversation avec sa réponse : « Et contre l’hérésie, l’Eglise admettait la violence ? La violence a été admise pendant huit siècles. Nous sommes au pouvoir depuis 1933. Que voulez-vous de nous ? En 11 ans, nous avons éliminé le chômage, nous avons nourri les Allemands. Oui, avec la violence ! Si vous êtes un opposant si dévoué, cela n’aurait pas été plus utile de combattre par le matériel, et non le spirituel ? »
Le pasteur ne comprend pas cette remarque, alors Stierlitz précise : « Vous devriez organiser un groupe contre l’Etat. » La réponse du pasteur est plein de dignité et montre qu’il est bien au-dessus de ses tortionnaires: « Si je reprenais vos méthodes, je deviendrais comme vous. »

Stierlitz essaie de voir les réactions du pasteur par un exemple, si une de ses ouailles voulait lutter contre le régime, qu’est-ce que le pasteur ferait, le pasteur dit qu’il le laisserait faire. Et à la question de Stierlitz : « Et si je viens vous voir et vous demande de le dénoncer ? » La réponse est pleine de mépris : « A vous, je ne dirais rien. »
3. Episode 1, le 12 février
Schellenberg félicite Stierlitz pour le recrutement du pasteur. « Je ne pensais pas qu’il dirait oui si vite. » « Je ne pensais pas qu’il accepterait de travailler avec nous. » Stierlitz suggère de le libérer et le mettre sous surveillance et lui passer un test.

C’était une erreur de placer cette scène après le dîner de Stierlitz avec le pasteur parce qu’il s’est complètement refermé, il avait un comportement de refus envers Stierlitz à tel point qu’il n’a même pas pris son dîner. Plus tard quand Eismann va réécouter l’interrogatoire que Stierlitz menait neuf jours plus tard avec le pasteur, nous allons être témoins de ce que le pasteur a finalement accepté de travailler pour Stierlitz. Cette scène aurait dû être placée après l’interrogatoire. En plus, Stierlitz emmène le pasteur à dîner le 12 février, Schellenberg lui félicite le 12 et Klaus sera infiltré chez lui le 15 février. Donc, entre le dîner dans le restaurant et la libération du pasteur il n’y pas neuf jours.
4. Episode 2, le 15 février
L’infiltration de Klaus chez le pasteur. Il doit se concentrer sur le travail du pasteur dans le mouvement pacifiste, pourquoi et chez qui est-il allé en Suisse, par exemple. Et comment il réagira au fait que Klaus est communiste. C’était sans doute l’idée de Stierlitz, il veut savoir s’il pourrait utiliser le pasteur à ses propres buts. Klaus se fait passer pour un prisonnier qui se serait évadé et chercherait de refuge dans l’église. Il fait semblant de s’évanouir en entrant avec peine dans l’église. Le pasteur prend soin de lui.

5. Episode 2, le 18 février
Klaus et Stierlitz dans la maison de Bolzen écoutent l’enregistrement de la conversation de Klaus avec le pasteur. Nous ne savons pas qui avait l’idée de faire cet enregistrement, Klaus ou Stierlitz et nous ne savons non plus où Klaus a pu cacher le magnétophone, puisqu’il n’avait qu’un vêtement de prisonnier sur lui.

La conversation de Klaus et le pasteur est plutôt philosophique mais le pasteur n’épargne pas le régime et ses chefs non plus. Leur conversation commence par la question de l’origine de l’homme, le pasteur dit bien sûr que c’est Dieu qui a créé l’homme, Klaus dit que l’homme descend du singe. Mais très vite Klaus commence à provoquer le pasteur quand ce dernier dit : « Vous croyez au singe dans l’homme et moi à dieu dans chaque homme », Klaus pose une question épineuse : « Dans chaque ? Et où est-il dans le führer ? Dans Himmler ? »
Le pasteur ne trouve pas tout de suite la réponse, dans le film il s’occupe de servir le dîner à Klaus. Pendant qu’il donne à manger à son protégé Klaus dit : « Vous n’aviez pas de chance avec vos compagnons de cellule. Nous, nous avions des débats étonnants. J’ai été éduqué en prison, je vous le jure. Dans les cellules, on ne posait pas de questions faciles. » Nous pouvons donc supposer que le pasteur lui a dit qu’il était en prison et dans quelles circonstances, mais nous ne savons pas quand le pasteur a mis Klaus dans la confidence.

Sur les instances de Klaus le pasteur donne sa réponse : « Voici. Nous discutons de la nature humaine. Bien sûr, dans chacune de ces canailles, et Hitler, et Himmler on peut trouver des traces de l’ange déchu. Toute leur nature est soumise aux lois de la cruauté, du mensonge, il ne reste en eux rien d’humain. »
Klaus lui reproche d’éviter les réponses précises, mais d’après nous ce n’était pas une réponse évasive, c’était une réponse qui développe un argument de manière détaillée.
Quand le pasteur le rappelle d’avoir fui du camp à l’église, Klaus entre encore une fois dans la provocation mais cette fois il provoque le pasteur dans sa foi et dans ses convictions aussi : « Si j’étais un enfant de dieu, pourquoi fuir d’un camps ? Je serais mort là-bas, en tendant l’autre joue. »
Le pasteur lui répond très ouvertement, il ne pense même pas aux conséquences : « Comment cela, en tendant l’autre joue ? Vous projetez une fable biblique sur la machine d’Etat nazie. Réfléchissez : une fable sur la conscience humaine et le nazisme ? Une machine privée de conscience dans son principe. Prenez une pierre sur la route, ou un mur devant vous, vous n’irez pas discuter avec eux comme avec un semblable ? »
Dans la continuations Klaus lui dit que quand il a travaillé comme journaliste, il a montré le monde des voleurs et des prostitués qui voulaient entrer en l’Eglise mais l’Eglise les a rejeté. Il dit que ses articles ont été interdits à la fois par les nazis et l’Eglise. Mais le pasteur ne réagit pas à la provocation de Klaus quand il parle de son Eglise comme si elle fonctionnait comme l’Etat nazi, il dit seulement : « Je ne vous juge pas pour la vérité. Je suis en désaccord avec vous sur le futur de l’homme. »

Klaus fait une remarque pour sonder sans doute les ambitions du pasteur : « Vous ne pensez plus comme un pasteur, mais comme un politique. » Mais le pasteur écarte cette idée d’aspirer à une carrière politique : « Vous voyez un politique dans tous les hommes. »
Et quand le pasteur dit à Klaus qu’il est trop énervé, Klaus aborde le prochain sujet : «Non, je ne m’énerve pas à cause de la discussion. Je voudrais entrer en contact avec mes camarades. » Le pasteur lui promet d’aider à trouver ses camarades, mais il trouve Klaus encore trop faible, qu’il reprenne des forces d’abord.
L’enregistrement s’achève ici mais nous ne comprenons pas de quels camarades parlait Klaus ? De vrais communistes, ou des agents comme lui ? Avec qui le pasteur a mis en contact Klaus, il connaissait des communistes ? Klaus a quitté le pasteur le jour précédent de sa rencontre avec Stierlitz mais où est-il allé quand il est parti de chez le pasteur ?
Il y a un moment intéressant pendant la conversation quand l’orgue retentit, le chantre de l’église joue et enseigne ses enfants à chanter, des jumeaux, l’un d’eux chante faux. Nous ne les voyons pas, nous les écoutons avec les personnages. Klaus se donne complètement à la musique et dans un moment donné le pasteur le regarde avec mépris et plus tard quand Stierlitz écoute l’enregistrement, il regarde Klaus avec le même mépris sur le visage.

Après avoir écouté l’enregistrement Stierlitz mène une conversation avec Klaus pour savoir plus sur ses intentions, son mode de penser et ses observations sur le pasteur : « Vous êtes convaincu que le vieux vous trouvera un contact ? » Klaus est très sûr de soi : « Oui, il fera tout ce que je voudrai. Qu’il ait caché un évadé du camp, montre assez son rapport au régime. J’aime beaucoup travailler avec des prêtres intellectuels. Il est étonnant de voir comment un homme court à sa perte. Je voudrais parfois crier arrête-toi, idiot. »
Stierlitz continue la conversation avec une nouvelle qui va étonner Klaus : « J’ai regardé votre dossier. » Klaus sursaute, il voudrait savoir son contenu mais selon Stierlitz : « votre dossier est ennuyeux. Rapports, dénonciations, tout est mélangé. Vos dénonciations, celles des autres sur vous. Sans intérêt. C’est autre chose qui m’intéresse. J’ai calculé que, grâce à vos rapports, vos actions, 97 personnes ont été arrêtées. Et aucune ne vous a trahi. Aucune ! Et pourtant la gestapo les a travaillés ! » Puis il demande ce qui lui intéresse le plus : « Avez-vous souffert, quand ceux qui vous avaient hébergé étaient arrêtés ? »
Klaus ne comprend pas vraiment cette question, il n’a pas l’air d’avoir des sentiments profonds envers les autres : « Qui sait ? Je me sentais fort en luttant contre eux. C’est la lutte qui m’intéressait. Ensuite… Je ne sais pas. Que deviendrons-nous, nous tous ?… Après nous le déluge. Et puis, nos clients, ce sont des couards, des faibles, des avares, des dénonciateurs. Chacun d’entre eux. On ne peut pas être libre parmi les esclaves. Ne vaut-il pas mieux être le plus libre des esclaves ? Toutes ces années, j’avais ma pleine liberté de penser. »
Stierlitz change de sujet et demande qui est venu voir le pasteur le jour précédent vers 9 heures, Klaus dit qu’hier n’est venu personne mais avant-hier c’était sa sœur qui est venue lui rendre visite avec ses deux enfants et le pasteur les aime tant qu’il les reconnaît de leurs pas.
Mais Stierlitz change de sujet de nouveau en demandant si Klaus est certains que le pasteur va travailler pour lui. Klaus est toujours sûr de soi, il est presque prétentieux : « Je ne travaille jamais sans résultat. Bien sûr, qu’il le fera. Je me sens une âme d’oppositionnel, de tribun, de chef. J’écrase les gens de ma logique implacable. » Et après une petite réflexion il ajoute : « Ce pasteur est très dangereux. » Stierlitz demande pourquoi et Klaus ne dit pas pourquoi il se contente de répondre : « Quelqu’un a fait une grosse erreur en le libérant. »
A cette remarque Stierlitz met fin à la discussion et félicite Klaus pour son travail, il se peut que c’était les mots qui ont fixé le sort de Klaus puisque c’était Stierlitz qui a suggéré de libérer le pasteur. Il lui dit donc qu’il va passer quelques jours dans une planque avant son nouveau travail et il lui demande d’écrire la lettre suivante : « Standartenführer, je suis mortellement fatigué. Mes forces s’épuisent. J’ai travaillé honnêtement, mais je n’en peux plus. Je veux me reposer. Klaus »
Klaus exécute l’ordre et quand il demande pourquoi il devait écrire cette lettre, Stierlitz lui explique qu’il voudrait l’envoyer à Innsbruck pour une semaine de vacances, il lui même donne une liasse de billets en disant que les casinos fonctionnent là-bas.

Stierlitz veut en avoir le cœur net et demande une précision : « Faites un effort de mémoire. Personne ne vous a vu chez le pasteur ? » Mais Klaus répond sans attendre : « Inutile. Personne ne m’a vu. » Et il tend la lettre à Stierlitz qui ne la prend pas, il ne la touche même pas, il demande Klaus de la mettre dans une enveloppe parce qu’ils vont la poster sur la route. Il demande également d’écrire une autre lettre au pasteur, pendant ce temps, il va faire du café.
Klaus écrit la lettre et Stierlitz brûle la bande d’enregistrement dans la cuisine. Il revient dans le salon avec du café.

Klaus lit sa lettre, ivre de triomphe: « L’honnêteté exige d’agir. La foi prend appui sur la lutte. Je ne peux pas donc me pardonner l’inaction. L’inaction est pire que le trahison. Je m’en vais pour continuer la lutte, Klaus. » Stierlitz le loue mais ils doivent se mettre en route parce que le jour se lève. A la demande de Klaus, Stierlitz explique que la planque est dans les bois, « à une dizaine de kilomètres. C’est très calme, vous vous y reposerez. »
Dans la voiture Stierlitz demande si le pasteur a parlé du ministre Krause mais Klaus dit que non, que le pasteur s’est fermé tout de suite et qu’il ne voulait insister. Stierlitz veut également savoir si le pasteur a parlé de la Suisse, mais Klaus dit que non. Donc le pasteur débattait avec plaisir sur des questions philosophiques et idéologiques avec Klaus mais il ne l’a pas mis dans la confidence concernant les questions concrètes.
Stierlitz conduit Klaus dans les bois, ils marchent sur un chemin, Klaus parle sans arrêt, Stierlitz reste derrière lui, il met son revolver dans la poche de son manteau. Klaus ne fait que parler et parler, il va s’entourer des livres, il aime lire parce qu’un « bon livre rend l’homme plus intelligent, plus complexe. »
Klaus continue à parler insouciant, mais il change de sujet et il parle de la nature : « Quel endroit magnifique ! Ca sent bon les feuilles mortes. Tous les condamnés à mort, avec qui j’ai discuté avant l’exécution, aimaient confesser leur amour de la nature. Ils trouvaient pour cela des mots magnifiques. Je dirais, des mots stupéfiants. Vous savez, Standartenfü… »

Klaus ne peut pas terminer sa phrase parce que dans cet instant Stierlitz le tue et Klaus tombe dans le lac, Stierlitz jette le revolver après lui.
Donc, le pasteur est libre, il reste entre les mains de Stierlitz, même Schellenberg ignore de quoi Klaus et le pasteur Schlag ont parlé, le seul homme qui savait est mort. Et avec la mort de Klaus Stierlitz aussi est libre à travailler avec le pasteur. Une question se pose après cette scène : quand est-ce que Stierlitz a décidé de tuer Klaus ? Apparemment il ne sympathisait pas avec lui, à plusieurs reprises il le regardait avec mépris, surtout quand Klaus a parlé de toutes ces gens qui ont été arrêtés en conséquence de son travail. Klaus a commis également l’erreur de se venter tout le temps ce qui pourrait le mener à se croire être au-dessus de Stierlitz. Et peut-être c’était sa fatuité qui a causé sa perte, quand il disait que quelqu’un a commis une grosse erreur en libérant le pasteur, c’était peut-être à cet instant que Stierlitz a pris la décision d’éliminer Klaus. Puisque c’était son idée de le libérer, c’était lui qui a suggéré à Schellenberg de mettre en liberté le pasteur et passer un test au lieu de mettre quelqu’un dans sa cellule.
Il paraît qu’avec cette remarque Klaus a signé son arrêt de mort parce que Stierlitz a considéré que Klaus est devenu dangereux non seulement pour lui mais pour l’opération qu’il préparait avec le pasteur. Lors de la dernière scène de Klaus, il fait des éloges à la nature disant que tous les condamnés à mort avec qui il travaillait parlaient de la nature d’un ton si élevé dont seuls les poètes sont capables. Il ne pensait même pas que lui aussi est un condamné à mort et le même sort l’attend que ceux qu’il a l’habitude de mentionner avec mépris.